Mauvaises langues

Mai 2024

Textes écrits dans le cadre de l'atelier Langue de lutte

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A partir d'un extrait des coupables innocentes de Mag Levêque

J'écris avec la distance nécessaire, celle qui me sépare des rails de la 7 et du fond du canal, j'écris avec la crampe qui ne quitte plus mon ventre depuis que j'ai tout oublié

Comment dormir comment manger comment me laver comment baiser sans freezer net

Il y en a qui répondent huile essentielle de lavande quand on leur dit dépression clinique

Qui ne reconnaissent le malheur qu'à la télé ou dans les beaux livres romantico~boring

Il y en a qui disent go with the flow, surfe sur tes galères psy, trouve un travail pour moins penser

Il y en a qui n'habitent jamais dans un placard coincé·e avec elleux-même ; qui prévoient des choses et s'y tiennent ; qui n'ont pas de bassine sous leur lit pour les 5 à 7 avec les cauchemars

Il y en a pour qui le coeur s'emballe uniquement lorsqu'iels sont amoureuXes ou pour leur oral de concours, il y en a qui ne se disent jamais cette fois j'explose, c'est ainsi que je me brise que je me dissous, battu·e par mon ombre, piétiné·e, battu·e par les lattes noueuses du lit trempé de sueur et d'espoirs fondus au soleil de mai

Il y en a qui ont faim et ne chient pas leurs peurs par la bouche, il y en a qui n'ont jamais peur, pensent à demain, à leur môme et à racheter du café, il y en a qui n'ont peur de rien sauf à ne pas laisser de trace, quand j'efface soigneusement celles de mon passage pour que l'on ne me retrouve pas

Je n'écris pas pour vous

Je ne vis pas pour vous

Je vis pour vous anéantir

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Avis de décès de la nuit

A toi la nuit partie trop tôt

Aux étoiles mortes avant ta naissance

Au sommeil englouti sous les cendres

Nous vous regretterons

Pas un jour ne passera sans qu'un jour ne passe plus

Jamais

Aux conseils et épiphanies que plus personne ne porte

Au marchand de sable qui fait la manche

A la fin des jours tristes et aux têtes reposées

Nous vous regretterons

Aux marées aux hiboux aux lueurs d'espoir aux phares inutiles

A la lune qui se décroche aux rêves qui ne se partagent plus

A tous les invisibles partis avec elle

Que l'après vous offre de nouvelles cachettes

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Inspiration : A mes soeurs de Stéphanie Vovor dans son recueil Frénésies

Pour celleux qui hurlent ou qui silencent

Celleux qui n'ont plus de larmes celleux les incapables

Aux enfances queers aux teams de vikos des collèges

Pour celleux qui sont devenus poètes

Pour les adelphes et les piliers

J'écris pour vous pour moi pour désarticuler le monde

Pour les mauvaises bouches pleines de gros mots et de foutre

J'écris pour qu'on grandisse ensemble dans nos maisons de cris