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Brasier buccal

Mars 2024

Texte rédigé dans le cadre de l'appel à contributions de la revue Carabosse sur le thème "Nos langues animales"


J’ai chaud putain j’ai


chaud la colère vient brûler ma bouche ; chaque été c’est pareil


La langue crépite les étincelles s’engouffrent dans l’œsophage et viennent chercher leur dose ; trouvent des parois pour s’exciter ;


au bout des lèvres la fureur on dit pas pour les humains surtout pas pour elles on dit faut se contenir alors putain j’ai chaud à force de mâcher mâcher


mâcher mes dents des tisonniers j’inspire grand prendre du recul on a dit 


j’alimente le brasier j’expire souffle souffle sur les braises c’est ça souffle ma belle putain j’ai. chaud putain quand la flamme s’échappe enfin par la grande cheminée elle ne s’encombre plus d’une discrétion de brindille


Elle claque elle


libère son essence elle s’auto alimente Poussée par la trachée elle explose je tempête de cendres de ravage carnage je feu diluvien ça sort aussi brutal que c’est rentré aux premières éruptions


Faut demander putain avant de déposer ses braises en l’autre sinon sinon sinon tout prend une ampleur incendie qu’est-ce que tu ne comprends pas ça me brûle ça me brûle tous ces putains de mots ça me brûle mais c’est bon c’est. Sorti. Je vais


Vous cramer de mes mots vous embaumer de mon souffre rance vous cramer j’ai dit et renaître t’as capté le phénix va te prendre et te péter la gueule tes forêts auront mauvaise mine tu diras « Eh mes forêts » et je dirai va bien te faire cuire le cul.


Pas très distingué / mais toi aussi ton cul empalé sur mes cimes noircies là


A force de mâcher mâcher mâcher on a collectivement créé une moitié d’humanimalités salamandre fennec dragons langues de -> désert <- de mots pour qualifier la sécheresse immense qui nous habite et nous consume mais assez assez j’en ai marre de me soumettre à plus fort que moi assez


Je veux dompter le feu et les hommes je n’en peux plus de regarder mes os rougir sans oser les toucher je veux ressentir dans ma chair le goût carbone de mes ancêtres goûter sur mes poils l’odeur bacon des drames ; muer vous balancer ma peau de morte à la gueule regarder vos yeux dégoût se débattre des restes.


A la fin le grand barbecue la cuve d’huile bouillante ; vous vous tiendrez bien droit re/dressés par nos fourches aiguisées à l’arrache


Sur vos dos lacérés par nos ongles de verre on vous bouffera


à la bourguignonne 


ça c’est raffiné ça c’est une mort utile l’autre moitié la nourriture pour nos estomacs depuis trop longtemps assiégés ; nous avons soif de vin et de vengeance on dit pas pour elles on dit se mange froid mais putain j’ai chaud putain je


Te promets les nôtres se dégusteront muy caliente la main qui tient le pic à broche a changé de camp alors courez courez sur les champs de braises ardentes, courez sous les averses


vos sueurs et nos larmes de lave ;


ça vous assaisonnera.

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